Élisa Grosman : “Mon univers coloré est grandement inspiré du cinéma”
Élisa Grosman est une photographe de 23 ans. Comptant plus de dix mille abonnés sur Instagram, elle s’est notamment fait connaître grâce à ses projets engagés et son travail avec des influenceuses. Pour ses photos, elle s’inspire fortement du cinéma, de son observation des autres et de la musique. Bienvenue dans son univers.
Comment est née ta passion pour la photographie ?
Ma passion pour la photo est arrivée assez tôt ! J’ai toujours été intéressée par l’image, la photographie… Mon père avait acheté un appareil reflex Pentax lorsque j’avais 9 ans. À l’origine, c’était un cadeau d’anniversaire pour ma mère, sauf qu’elle n’était pas du tout branchée photographie. Je l’ai donc très vite pris pour faire des photos avec mes amies. On faisait des après-midi shooting les samedis. Ma passion est donc née assez tôt, même si j’ai commencé à réellement la développer à partir de mes 21 ans, en décembre 2018. Je m’y suis donc mise sérieusement assez tard, mais mon intérêt pour la photo a toujours été présent.
Comment décrirais-tu ton travail ? De quoi t’inspires-tu ?
Je ne saurais pas vraiment décrire mon travail. Si je devais le définir en trois mots, je dirais : coloré/pigmenté (j’aime bien ce terme), sombre et mélancolique. Aujourd’hui, on retrouve une vraie saturation des couleurs dans mes photos, mais dans un univers assez sombre. J’aime beaucoup justement ce contraste coloré/sombre qui normalement devrait s’opposer, mais qui forme une alliance dans mon travail.
Cet univers coloré, et assez mélancolique également, est grandement inspiré du cinéma. Ma première inspiration ne vient pas de la photo ou de photographes mais du cinéma. Je dirais même que c’est ce qui m’a donné envie de commencer la photo. Si je peux citer quelques réalisateurs, je dirais évidemment Gaspar Noé, David Lynch, Dario Argento… Ils m’ont beaucoup inspirée, notamment dans ma colorimétrie. On peut également dire que je m’inspire du monde qui m’entoure, des gens. J’adore observer les gens. Cela peut paraître assez bateau mais c’est la vérité. La musique est une source d’inspiration également. En tout cas, mes inspirations ne viennent absolument pas de la photo.
Comment prépares-tu tes shootings ? As-tu une idée bien précise du rendu que tu souhaites obtenir ou avises-tu au fil de la séance et/ou des retouches ?
En général, il y a une grosse préparation. Que ce soit pour mes collaborations ou mes clients, j’aime bien faire un mood board au préalable afin de fixer une ambiance. C’est vraiment très important pour moi. Les prises de vue, le déroulement du shooting… tout est réfléchi en amont notamment pour ne pas perdre de temps. Le/la modèl.e, le/la maquilleur.euse, le/la styliste sont donc préparés à l’avance. Je suis assez organisée par rapport à ça. Par la suite, concernant les retouches et la construction de l’univers, j’avise sur le moment. Je n’ai jamais une idée précise des retouches que je vais faire.
Quelle importance accordes-tu aux retouches sur tes photos ?
Je dis souvent que la retouche, c’est 60% du travail. Peut-être que c’est un peu moins aujourd’hui car il y a beaucoup de préparation, mais selon moi c’est vraiment là que je construis l’univers de la photo. Les photos brutes me plaisent beaucoup, mais c’est grâce aux retouches que je définis vers quoi je veux aller.
Quels messages souhaites-tu véhiculer à travers ton travail ?
Je ne sais pas si j’en ai particulièrement. Au début, j’étais assez engagée sur certains sujets, il y avait de vraies thématiques. Mon premier photoshoot à thème où il y avait un réel message dénonçait la masculinité toxique. J’ai par la suite réalisé une séance photo sur l’acné et ses conséquences psychologiques avec ma sœur, une série de photos traitant du plaisir féminin avec la créatrice du compte Instagram et du livre Je m’en bats le clito. J’avais donc une vraie volonté de faire passer des messages. Aujourd’hui, peut-être un peu moins. Je n’ai pas envie de forcément représenter une cause. On peut dire que mes messages sont plus subtils, qu’il n’y a pas de volonté de transmission directe. Néanmoins, j’aime représenter une diversité de modèles et de corps afin de ne pas rester dans des codes normés et de transgresser les barrières.
Comment es-tu parvenue à réaliser un shooting avec une influenceuse pour la première fois ? Était-ce un but afin de donner de la visibilité à ton travail ?
Mon premier shooting avec une influenceuse s’est déroulé en juillet 2019. C’était pour Gloria Raïssa. Ce qui est assez drôle, c’est que c’est elle qui est tombée sur mon compte Instagram. Elle a répondu à une story où je disais que je venais à Lyon pour faire des shootings. Elle m’a dit qu’elle adorait mon travail et qu’elle était partante pour une séance photo. J’étais surprise et impressionnée à l’idée de me dire que je pouvais photographier des influenceuses. J’ai donc fait ce premier shooting avec elle. Ce n’est que par la suite que je me suis dis que c’était intéressant de contacter des influenceurs.euses. Toutes les autres influenceuses avec qui j’ai travaillé, je les avais contactées en amont.
Oui, il y a une volonté d’avoir plus de visibilité en travaillant avec ce genre de modèle, mais j’ai toujours choisi des personnalités qui étaient en accord avec mes valeurs. Je n’ai pas pris n’importe quelle influenceuse dans le but d’être plus vue. Je voulais vraiment avoir des profils particuliers, représenter une diversité.
Élisa a notamment travaillé avec Shera Kerienski, Marion Séclin, Léna Mahfouf et Coucou Les Girls.
Qu’est-ce que les shootings avec les influenceuses t’ont apporté ?
Ce qui est très intéressant, c’est que l’on a plus d’opportunités de lieux, de vêtements… On peut travailler plus facilement avec des stylistes ou avoir des lieux de shooting originaux, étant donné qu’elles ont une grande visibilité. Mais ce que j’ai beaucoup apprécié aussi, c’était de pouvoir parler avec elles et de me rendre compte qu’elles avaient pour la plupart totalement les pieds sur terre, que ce sont des personnes “normales” qui ont simplement beaucoup plus de visibilité. J’ai également pu discuter de leur parcours, c’était vraiment des échanges très enrichissants. Je pense que cela m’a plus apporté personnellement que professionnellement, même si on me parle encore beaucoup de mon travail avec les influenceuses, alors que je me dirige vers autre chose aujourd’hui. Bien évidemment, je ne nie pas le fait que cela fut un tremplin pour me faire des contacts ainsi que pour acquérir une crédibilité.
Présente-nous le projet dont tu es la plus fière.
Je suis assez fière de la plupart de mes projets. Mais celui dont je suis la plus fière est le projet photo/vidéo avec Camille Aumont Carnel, la créatrice du compte Instagram et du livre Je m’en bats le clito, concernant les tabous autour du corps de la femme. Je suis très fière de la vidéo car elle a eu beaucoup de répercussions sur Instagram et sur la communauté de Camille. On a exposé différents sujets comme l’épilation, la transpiration, les règles et le plaisir féminin. Cette vidéo d’une minute trente me tient vraiment à cœur car nous l’avons écrite ensemble et qu’elle a permis de toucher les gens.
Quelles sont tes ambitions pour l’avenir ?
Évidemment continuer la photo, mais j’aimerais beaucoup me diriger vers de la réalisation. C’est d’ailleurs en cours puisqu’en ce moment je suis en pleine préparation d’un court-métrage en coréalisation. Nous allons sûrement tourner courant 2022. C’est un gros projet pour moi car c’est ce vers quoi j’aspire. La photo est un plaisir mais mes ambitions réelles touchent à la réalisation, notamment de film. C’est la prochaine étape ! Cela prend plus de temps que la photo mais le plaisir n’en est que plus grand.
Suivez Élisa sur Instagram et sur son site Internet. Réservez un shooting photo avec elle !
Propos recueillis par Marjolaine Dutreuil
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